Publié le 13 février 2022
[Illustration : Dirk Jurriaan Sluyter, d’après Johannes Hilverdink, Landschap bij nacht, avant ou après 1870, Amsterdam, Rijksmuseum, Collection en ligne]
Le 25 janvier 2022 s’est tenue la première séance des Rencontre Muséo IDF – « Les expositions en ligne » (commissariat : Sébastien Appiotti, Marie Ballarini, Marie Laure Bernon). Intitulée “Diversité des formats des expositions en ligne”, la séance a réuni jusqu’à 60 professionel.le.s et chercheur.se.s et étudiant.e.s à la maison de la recherche de la Sorbonne nouvelle et sur zoom. Vous trouverez ici un compte rendu des trois interventions de la soirée. La captation de la rencontre est aussi disponible sur la page Youtube de Mêtis.
La séance, et le cycle en lui-même, est introduite par Marie Ballarini, responsable des événements Mêtis et co-commissaire du cycle. Les expositions en ligne ont été fortement médiatisées lors des divers confinements dus à la crise sanitaire, cependant, certains établissements ont commencé il y a très longtemps à les proposer à leur public. Cette séance s’attache à revenir sur la définition du terme “exposition en ligne”, qui exprime une grande diversité de format, d’en apprécier l’histoire, la dimension technique et celle des objectifs des institutions.
Lise Renaud – Exploration des formats médiatiques
La première intervention est présentée par Lise Renaud, maîtresse de conférence à Avignon Université et se concentre sur la terminologie du terme. Face à une hétérogénéité du vocabulaire employé, elle note toutefois des effets de modes, parlant de “cyber-exposition” ou “cybermusée” dans les années 90 suivie plus récemment par les termes “visites virtuelles” ou “visite 360”. Il existe aussi des tendances dans les formats et une accélération dans la production de ces formats médiatiques depuis la crise sanitaire de 2020. Elle insiste sur la nécessité de reprendre la terminologie de la visite virtuelle de manière historique et de la rattacher à son évolution technologique en partant des CD Roms ou films d’exposition à travers une archéologie des formats. Le premier exemple du genre est l’exposition Le siècle des lumières à la BnF (illustration 1.) en 1994. Les expositions en ligne se sont développées en parallèle des sites institutionnels (Couillard 2017) et dans un cadre d’injonction à l’innovation et au développement technologique (Appiotti et Sandri 2020). Lise Renaud propose quelques exemples de visite types de la BnF, de la Cité de l’architecture ou encore celui du Grand Palais qui reprend un modèle Google Street View. Ces exemples montrent que dans une même institution, les formats évoluent ou sont développés en parallèle, la BnF, pionnière du concept en est un bon exemple traité par Laborderie (2020).
Lise Renaud propose de caractériser les dispositifs en fonction des postures perceptives des internautes et des modes de représentation et aboutit à une typologie. Lise Renaud s’interroge encore dans ses travaux sur les raisons des choix et les variables de décisions des institutions dans le choix d’un format ou d’un autre ainsi que sur les stratégies de médiation encodées dans ces productions médiatiques.
Frédéric Gourdet – La diversité des dispositifs à l’angle de la technologie
Frédéric Gourdet commence par présenter l’entreprise Art Graphique Patrimoine et ses compétences en photogrammétrie et laserométrie. Les dispositifs varient de la visite 360° conçue pour le web aux collections disponibles en réalité virtuelle en passant par la diffusion par application et les expériences immersives multijoueurs : ces méthodes sont proposées aux institutions en fonction de leurs besoins et de leur budget. En raison de la crise sanitaire, il note que beaucoup d’outils conçus pour être consommés sur place afin d’”augmenter” la visite, ont été mis à disposition des publics éloignés mais sont ensuite devenus des outils “produits d’appel” pour inviter à la visite. Les dispositifs ludiques multijoueurs sont également de plus en plus présents, sur place mais également en téléchargement via des plateformes de jeux vidéo, comme Steam. En ce sens, le rôle de la socialisation et de la visite collective en réalité virtuelle permet d’améliorer l’expérience en ligne. Dans toutes ces situations, l’entreprise numérise les œuvres et monuments et modélise en 3D afin d’obtenir un rendu adéquat au format. Les meilleurs rendus, trop lourds pour être gérés actuellement par un ordinateur grand public, sont limités à un usage de conservation. La médiation demandant de pouvoir manipuler l’image en direct, le poids du fichier doit rester raisonnable – le rendu visuel en qualité moindre en est toutefois extrêmement proche à l’œil.
Patrick Bergeot – Expérimentation des visites guidées à distance : Quels formats pour quels parcours ?
Patrick Bergeot présente les expérimentations des visites guidées à distance du Centre des monuments nationaux (Cmn) nées en septembre 2020 avec deux cibles, celui des publics scolaires et celui du grand public. Si dans le premier cas, l’objectif était purement éducatif et de diffusion du savoir, dans le second, l’expérimentation devait chercher à déterminer si ces dispositifs représentaient une opportunité économique. Le choix a été fait de mettre en place des visites guidées, avec un médiateur humain. En parallèle, le Cmn a également lancé des expérimentations sur des formats plus innovants. Durant 4 mois, les visites ont été mises à disposition gratuitement. Dès le départ, ont été testés deux formats de visites guidées, le format livestream, où le médiateur se filme en direct et le format 360° où une vidéo a été captée en amont et est commentée en direct par le médiateur. Pour numériser les lieux, le Cmn est passé par 17 prestataires différents en raison des limitations de chaque technologie et de la diversité des lieux. Le livestream est très peu coûteux à l’investissement mais demande des conditions météo, sonores ou de connexion excellentes pour permettre un déroulé plaisant de la visite. Lors des enquêtes de satisfaction menées, les publics semblent très heureux de leur expérience avec un taux de 97% de satisfaction (comparativement 95% in situ). Le format n’a pas d’impact sur ce taux, en revanche, l’élément décisif d’appréciation de la visite semble être la qualité de la médiation humaine. Pour plus de détails sur l’étude de satisfaction, vous pouvez retrouver le livre blanc.
Bibliographie
APPIOTTI, Sébastien et SANDRI, Éva. (2020). «Innovez! Participez!» Interroger la relation entre musée et numérique au travers des injonctions adressées aux professionnels. Culture & Musées. Muséologie et recherches sur la culture, 2020, no 35, p. 25-48.
COUILLARD, Noémie. (2017). Les community managers des musées français: Identité professionnelle, stratégies numériques et politiques des publics. Thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, soutenue le 29 juin 2017. Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse.
LABORDERIE, Arnaud. (2020). Les expositions virtuelles de la BnF de 1998 à 2020. Retour sur vingt ans de pratiques de médiation en ligne. Culture & Musées. Muséologie et recherches sur la culture, 2020, no 35, p. 324-330.
Pour citer cet article : BALLARINI, Marie. (2022). Compte-rendu de la Rencontre muséo IDF « Les expositions en ligne »., Metis Lab, publié le 13 février 2022. Disponible sur :
metis-lab.com/2022/02/13/compte-rendu-de-la-rencontre-museo-idf-les-expositions-en-ligne/
1 réflexion au sujet de “Compte-rendu de la Rencontre muséo IDF « Les expositions en ligne ».”